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mardi 31 août 2010

La fille qui minaude

Samedi soir.
Adepte du jean-T shirt, je m’arrache : ce soir je donne tout. Je dois retrouver Arthur à une soirée au bord du canal.
Yeux savamment travaillés, une jolie robe d’été, des sandales toutes neuves qui m’arrachent l’orteil droit à peine j’ai sauté dans le métro. Pas grave. Je tiendrai jusqu’à 6h s’il le faut. Oui, j’ai fait des efforts, et ça se voit.

J’arrive, comme d’habitude, avec une heure de retard. Sereine, le pack de bière qui ne rentrait pas dans mon petit sac me scie les doigts depuis une demie heure, j’essuie rapidement les gouttes de sueur qui maculent mon front (heure de pointe dans le métro un samedi du mois de juillet oblige).
Je lève mes bras bien haut et les agite en direction d’Arthur. C’est un peu embarrassant. (redite volontaire : heure de pointe dans le métro un samedi du mois de juillet oblige).   Merde, je me fais alpaguer par son pote lourd. Je lui dégaine mon plus joli sourire (se mettre ses copains dans la poche), lui tends une bière tiède, tente un débordement sur la droite. Peine perdue, il me branche sur mon dernier boulot, l’humanitaire ça l’intéresse, l’éco c’est sa passion. Impossible de m’en dépêtrer.
C’est à ce moment qu’apparaît mon amie L, cigarette au bec et paquet de chips à la main, sort une vanne tellement trash que le pauvre garçon bat en retraite. Obstacle numéro 1 levé.
Arthur m’a vue, me sourit, me parle deux minutes avant de partir à la recherche d’un tire-bouchon. A l’aise : contact établi, ça va rouler.

Et là, je la vois. Je la vois ELLE, qui lui tend le fameux instrument. Qui d’autre que la fille qui minaude pourrait sortir une phrase aussi affligeante que « Je me ballade généralement avec un couteau-suisse quand je sors, c’est petit mais très pratique. En plus c’est rouge et joli. « hihi » ». Et le pire c’est que cette technique – d’une connerie abyssale- marche à tous les coups.
10 putain de minutes qu’il est en train de débouchonner sa bouteille, et l’autre abrutie qui continue à sourire bêtement en dodelinant de la tête.

Pas spécialement jolie. Pas apprêtée. Le QI d’une moule de bouchot. Mais ce petit air de ne pas y toucher. L’air faussement roots des minettes qui passent au minimum 35 minutes devant leur miroir à calculer comment décoiffer leurs cheveux pour pouvoir mettre en valeur leur minois. Une écharpe achetée dans un souk lors de ses dernières vacances Club-med en Tunisie et un bracelet de cheville acheté à Saint Ouen. Mais c’est qu’elle sait embellir la réalité, elle est même TRES FORTE : ça devient donc une étole tissée par des moines bhoutanais et le bracelet offert par une petite fille à qui elle a donné de l’eau dans un village ladakhi. Chi-qué. Toujours ce même petit regard en coin, et ce faux sourire à deux balles.

La pseudo-cool est en fait une control freak. C’est d’ailleurs pour ça que la fille qui minaude reste au stade pompette, et toute « cool » qu’elle est, ne finira jamais par raconter des blagues sales avant de vomir derrière une poubelle. De même, elle n’ira jamais à l’encontre de ce que dit son interlocuteur. Plusieurs raisons.
  1. Elle manque cruellement de personnalité
  2. Son intellect, généralement limité, l’empêche d’avoir ne serait ce qu’un trait de répartie
  3. Ce même intellect, bien qu’embryonnaire, est suffisamment développé pour réaliser que la flatterie et la complaisance comptent parmi les meilleurs moyens de parvenir à ses fins. Ses fins étant, vous l’aurez bien compris, de se mettre la personne d’en face dans la poche.

Mais c’est qu’il tombe dans le panneau en plus. Et beh.

Tant pis, je tente le tout pour le tout : je me plante devant eux.
« Le dernier métro…c’est bien à 2h, non ? » Evidemment que je connais la réponse à cette question ! C’est un SIGNE.

(« Signe » : tentative, généralement féminine, de marquer son intérêt pour une personne. Si cette dernière est du sexe opposé, il est peu probable qu’il soit perçu. En effet, la compréhension du signe/signal  relève généralement du domaine de l’implicite. Une certaine forme de subtilité en quelque sorte.
Malheureusement, l’expérience a montré que le signal féminin peut souvent  être plus que fin, et passer inévitablement à la trappe. L’histoire de ma vie.)

Signe qui, en l’occurrence,  veut dire : Arthur, je décanille d’ici 20 minutes ; si tu veux me parler, c’est maintenant. Et, ne le prend surtout pas personnellement, mais je crois que tu es en train de te faire avoir par une cruche aux gouts vestimentaires plus que douteux, qui manipule des ficelles aussi épaisses que les sourcils de Demis Roussos. Fuis. Et fuis avec moi (surtout).  

Elle se lève. Elle me claque la bise. Elle lui caresse la joue.
La fille qui minaude n’est pas très subtile.

OK. J’abandonne.
J’embarque L: il est toujours temps de rattraper cette triste aventure autour d’un picon-bière et d’un bon babyfoot. En espérant ne plus la croiser, au moins pour le reste de la soirée.
Parce qu’elle est partout : dans les soirées de ton mec, dans celle de ton ex, même dans tes soirées entre potes, elle arrive à flinguer ton plan. A faire la fausse copine alors qu’on se connait depuis 3 minutes. A rire aux blagues pathétiques de ton copain Gégé. A se tortiller les cheveux. A taper dans ses mains dès qu’elle aperçoit un djembé.

Mais voilà, ça marche.
Et moi, j’ai acheté un couteau-suisse, juste au cas où.



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